On ne change pas la culture, on l'incarne.
Cet article s’appuie sur la vision de Judith Glaser sur le sujet du changement organisationnel, et plus précisément de la transformation culturelle.
Je n’adhère pas à l’ensemble de son point de vue (notamment les point n°3, 4 et 8) mais je vous ai tout de même synthétisé les 10 principes clés qu’elle défend.
Bonne lecture.
1. La culture = c’est ce qui est “normal” ici
Oubliez les slogans. La culture, la vraie, c’est ce que font les gens quand personne ne les regarde. C’est une sorte de règlement intérieur invisible :
Qui a le droit de contester l’autorité ?
Qui a le droit aux félicitations ?
Qui se tait pour rester en sécurité ?
Et vous vous en doutez sûrement, mais quand ces normes sont toxiques, aucun rebranding ne pourra sauver votre organisation. La culture, ce n’est pas ce que vous dites, c’est ce que vous tolérez.
2. On ne répare pas une culture avec un PowerPoint
Beaucoup d’organisations échouent dans leurs initiatives de changement culturel car ces derniers sont envisagés comme des campagnes de communication. En d’autres termes, elles annoncent des valeurs, placardent des posters géants, organisent des ateliers “inspirants” mais rien ne change.
Alors, pourquoi ? Parce que les comportements ne changent pas les slogans, ils suivent principalement la sécurité psychologique et la confiance. Si les gens ne se sentent pas en sécurité pour parler ou contester, ils feront semblant d’être alignés. Et la gangrène continuera un cran de plus.
3. Forcer crée de la résistance. Toujours.
Pour Judith Glaser, le plus grand piège, c’est de vouloir “installer” une culture un peu comme une mise à jour logicielle. Elle appelle ça la stratégie du push : le management impose un changement comportemental, en supposant que si les individus s’y conforment, le succès sera au rendez-vous.
Résultat : plus vous forcez, plus les gens résistent en silence.
4. La conversation comme stratégie de changement culturel
La culture ne se gère pas comme un projet, mais comme une langue commune, construite à travers des conversations ouvertes et régulières :
Quels sont nos plus grands défis ?
Quelle équipe voulons-nous être ?
Qu’est-ce qu’on construit ensemble ?
Peu importe la taille : de la startup à IBM, vous ne pouvez pas diriger des gens qui ne se sentent pas écoutés.
5. Le rôle du manager ? Créer l’espace pour la vérité
Les grands leaders définissent la culture en donnant « le ton de la vérité »”.
Exemple : après plusieurs fusions, le CEO de VeriSign a instauré une règle pour toutes les réunions :
“Les sujets difficiles sont toujours sur la table.”
Non pas parce que le conflit est agréable, mais parce qu’éviter les tensions tue la confiance.
6. Une culture saine vit dans les conversations du quotidien
La culture ne change pas au séminaire annuel, mais dans les actions et interactions ordinaires :
Comment donnez-vous du feedback ?
Le désaccord est-il puni ou valorisé ?
Qui a la parole dans la pièce ?
C’est un véritable marathon, chaque conversation, chaque comportement pousse la culture en avant…ou en arrière.
En d’autres termes, Managers, ne blâmez pas les RH et surveillez la prochaine phrase que vous direz à votre collaborateur.
7. Les 7 gènes CHANGES qui façonnent une culture
Le modèle CHANGES de Glaser identifie 7 « gènes culturels » :
C — Co-création : N’annoncez pas le plan. Construisez-le avec vos équipes.
H — Humanisation : Passez du jugement à la reconnaissance. Valorisez l’effort, pas juste le résultat.
A — Aspiration : Partagez des rêves, pas que des tâches. L’aspiration crée l’énergie.
N — Navigation : Partagez le pouvoir. Supprimez la territorialité et la rétention d’information.
G — Générativité : Encouragez les idées neuves. Évitez le consensus de confort.
E — Expression : Donnez une voix à chacun. Le contrôle tue l’innovation.
S — Esprit : Célébrez les victoires collectives. Normalisez la réinvention après l’échec.
8. La culture est la responsabilité de tous
Pour Glaser, la culture n’appartient pas au COMEX.
Que vous soyez nouvel employé ou cadre dirigeant, elle recommande 3 pratiques simples :
Lancez les alertes. Parlez avant que les problèmes ne métastasent.
Donnez du feedback. Franc, propre, orienté progrès.
Regardez vers l’avant. Cessez de surveiller le passé. Façonnez la suite.
En 3 mots : Soyez le standard.
9. « Nous » > « Je » > « Eux »
Glaser affirme que la culture évolue lorsque les individus :
partagent l’information librement,
collaborent au-delà des statuts hiérarchiques ou fonctionnels,
Pensent en « nous », pas en « moi contre eux ». La territorialité (presque tribale) révèle souvent de la peur.
La culture meurt quand pouvoir et information sont monopolisés.
10. Le seul vrai « hack » culturel : l’incarner
Prolongement du point 8 : si vous attendez que les autres changent pour oser agir différemment, c’est vous, le “problème culturel”.
Commencez par vous. Montrez l’exemple :
Parlez avec franchise.
Invitez à collaborer.
Agissez comme si la culture était votre responsabilité. Parce que c’est le cas au moins dans votre équipe directe.
La culture ne s’enseigne pas — elle se transmet.
Si cet article a piqué votre curiosité, le livre de Judith Glaser, “Creating WE: Change I-Thinking to We-Thinking and Build a Healthy, Thriving Organization”, est disponible sur ce lien.
À votre solidité,
Olivier KAMEL